LA  BOUVARDIERE
  (Extrait de l'historique réalisé par  Eric GAUTHIER )
 
 

Elle était jadis couverte de bois (6000 hectares à l’époque, à peine 6 aujourd’hui) ainsi qu’il apparaît au procès verbal des Commissaires Experts du Directoire du District de Nantes, dressé le 1er Messidor de l’an II mais son origine remonte avant l’an 1360, où la seigneurie et les terres appartenaient à la Famille L’Espervier : d’abord Simon (dont on dit qu’il fut emmuré vivant dans le manoir) puis Georges suivi d’Arthur

 
 
Manoir de la Bouvardière, dont les portes à ogives, encore bouchées aujourd’hui, expliquent certainement la légende de « l’emmuré vivant ».
 
Arthur L’Espervier, marchand d’épices et Grand Veneur de Bretagne depuis 1488, devint donc  le propriétaire de la Bouvardière (où se réfugièrent Anne Beaujeu et sa sœur Isabeau, lors du siège de Nantes par l’armée française en 1487) et prit pour épouse Françoise, fille unique de Pierre Landais.
 

D’après l’Armorial et nobiliaire de Bretagne de Potier de Courcy, la famille de l’Espervier possédait plusieurs seigneuries dans le comté nantais, notamment la Gascherie, paroisse de la Chapelle-sur-Erdre, le Briort, paroisse de Port-Saint-Père, la Bouvardière et Langevinière, paroisse de Saint-Herblain, etc… ainsi que dans l’évêché de Saint-Brieuc, le Boisglé, paroisse du Quessoy, et dans l’évêché de Rennes, la Richardais, paroisse de Montreuil.

 

           Le Pont en Vertais, devait faire partie de la dote de Françoise Landais. C’est à lui que nous proposons d’attribuer ce sceau qui date certainement du tournant des XVe et XVIe siècles.
 
 

Le sceau des contrats d’Arthur de l’Espervier,

Gouverneur de Nantes et Grand Veneur de Bretagne

Inscription : « Des Contrats du Pont en Vertoy »

Musée départemental Dobrée à Nantes sous le numéro d’inventaire 968.1.98

 

Pierre Landais, qui maria sa fille unique à Arthur Lespervier fut ainsi à l’origine d’une partie des constructions actuelles.

 

Né vers 1430 à Vitré, issu d'une famille de drapiers enrichie par le commerce international, Pierre Landais arrive aux plus hautes fonctions de l’Etat grâce à sa vivacité d’esprit, à ses fortes capacités et sait se rendre indispensable au futur duc François II en fournissant sa garde-robe.

 

Dès 1460, il devient grand argentier et receveur général du Duché de Bretagne, fonctions qu'il ne quitte plus jusqu'à sa mort, longévité inédite en Bretagne.

 

Il assure la recette générale du fouage et de l'aide des villes, cumule la recette du domaine de Rennes et la trésorerie des guerres.

 

Pareille attitude lui vaut bien des inimitiés, même s'il a su créer parallèlement un réseau de fidèles et d'obligés dans l'administration.

 

Ces inimitiés sont en outre alimentées par les prises de position politiques de ce ministre qui, à la fin des années 1470, occupe une place croissante au conseil, et y fait triompher les thèses indépendantistes contre le compromis avec la France prôné par Chauvin.

 

Il est un farouche défenseur du maintien de l’indépendance du pays et s’oppose à quelques grandes familles nobles (maréchal de Rieux, Vicomte de Rohan etc…) qui choisissent le parti français.

 

Le fait que les nobles félons lui reprochent ses origines roturières et son influence sur le Duc les empêchant de mener à bien leur plan de trahison mais également la conjonction des oppositions des grands écartés du pouvoir, des agents du roi et d'une population lassée de payer trop d'impôt rendirent sa fin tragique : il fut arrêté au château de Nantes où il s’était réfugié dans la chambre même du Prince (il s’était caché dans une armoire dont le Duc avait gardé la clé).

 

Le Duc  fut obligé, tant l’irritation populaire était grande, de le livrer au chancelier de Bretagne François Chrétien : « Je vous le livre, lui dit-il, et vous commande sur votre vie de lui administrer justice et de vous souvenir que vous lui êtes redevable de votre charge ».

 

 Il fut condamné à mort et pendu à Nantes, sur la prée de Bièce, le 19 juillet 1485 certainement pour avoir cru possible l'émancipation du duché, mais aussi parce qu'il a manqué de mesure dans sa manière de gérer l'État.

 

Durant son veuvage, Anne de Bretagne eut la volonté de reprendre en main son duché tout en en réaffirmant l’indépendance. Pour cela, elle chassa les hommes du roi et plaça ses fidèles à des postes clés. C’est ainsi que le 1er novembre 1498, Arthur de l’Espervier, lieutenant d’Anne de Bretagne, fut nommé gouverneur de la place de Nantes. Il décède en 1510.

 

Par la suite, la puissante seigneurie de la Bouvardière passa notamment aux mains de Claude de Bouille (Perrine Lespervier sa femme y revint en 1540 après le décès de son frère, le dominicain François Lespervier), Antoine de Mellient époux d’Anne de Caderan (1653), Jean de Mellient (1689),  Christophe de Coutance, Seigneur de la Salle (1691), Hilarien de Becdelièvre Marquis de la Seilleraie (1776).

 

           Quant éclata la Révolution, La Bouvardière appartenait à Lelasseur de Ranzé. On rapporte que le jour où la Bouvardière fut livrée au feu des bougies, Lelasseur de Ranzé s’était caché dans la salle d’adjudication, derrière une glace mobile pour entendre les enchères et le nom de l’acquéreur (notes sur l’arrondissement de Nantes, Tome 2, volume 1486).
           François Touzeau fut déclaré adjudicataire de la propriété de la Bouvardière par procès-verbal du 17 Vendémiaire AN III, passé devant le Directoire du District de Nantes. Il entreprit dès lors, dit la chronique, la recherche du « trésor » ; il n’hésita pas à livrer à la pioche ingrate du démolisseur les deux tours et même une partie des bâtiments de la Bouvardière, qui à cette époque devait entourer de trois côtés une cour pavée, fermée par une grille monumentale.
 
Fort heureusement pour le pittoresque, le fronton armoiré ne fut pas détruit.
 
                   La Bouvardière connut plusieurs propriétaires successifs qui n’avaient pour préoccupation que l’embellissement de la propriété, et sous le Premier Empire, la restauration du dernier corps de bâtiments fut érigée par Ceineray, architecte attitré de Napoléon, qui traça les plans de l’Hôtel de la Préfecture et des principaux édifices de la ville de Nantes. (d’où « le quai Ceineray », la rue de la préfecture).
 
 

Aquarelle de Jeanne Goullin (1879-1955) vers 1900

 

                En 1913,  c’est Louis Amieux (1867-1936) qui devint le propriétaire de la Bouvardière.

 

                Né à Nantes le 13 juillet 1867, il est un des fils de Jean-Maurice Amieux co-fondateur de la conserverie Amieux-Frères. Sorti en 1885 de l’Ecole supérieure de commerce de Paris, Il entre à 22 ans dans l’industrie de la conserve en devenant le collaborateur de son père. A la mort de celui-ci, en 1919, il dirige avec un de ses frères, la conserverie dont la réputation s’étend au monde entier. Grand défenseur du « Patronat Social », en 1923, il installe rue des Salorges dans l’usine désaffectée du conserveur Joseph Colin, le “Musée technique et rétrospectif de la conserve”, ancêtre de l’actuel musée des Salorges. 

 

               Il restaura la Bouvardière et en particulier le château lui même (château qui aurait été construit vers 1830, information non vérifiée. Ces propriétés florissantes étaient nommées « Folies »).

 

              Il remplaça notamment les pavés disgracieux par un  parterre « à la Française » et donna à la Bouvardière le cachet qu’on lui connaît aujourd’hui en laissant au portail d’entrée sa majesté, aux appartements leur noblesse, au petit escalier à vis du manoir son mystère et à l’élégante charmille du parc ses secrets.

 
                  
Porte donnant accès à la Salle du Jugement, Cheminée monumentale et escalier à vis du Manoir.
 

             L’avancée en arrondi sur la façade de la Bouvardière (Salle honneur et bureau Commandant) a été construite vers 1920 par M. Amieux, il y avait 3 étangs sur la propriété, l’un d’entre eux étant ce qu’on appelle un saut de loup et se trouvait sur une interruption du mur d’enceinte.  Le parc comprenait plusieurs entrées et une chapelle qui a été détruite se trouvait non loin de la stèle des fusillés actuelle.

 

            Peu de temps avant la guerre, la propriété aurait été rachetée par la Banque d’Algérie, pour en faire un centre de repos (qui n’a jamais vu le jour), les bâtiments ne servant alors qu’à un dépôt d’archives.