La garde personnelle du chef de l’État 1940-1944
(Source : http://www.resgend.fr/la-garde-personnelle-du-chef-de-letat-1940-1944)
 
                  
 
Après la défaite de juin 1940, le siège du pouvoir français se trouve à Vichy, en zone libre. Un nouveau régime politique s’instaure. Il est incarné par le maréchal Pétain, encore auréolé de sa gloire acquise durant la Grande Guerre. Afin de protéger le chef de l’État, il apparaît indispensable de créer un corps spécial.
 
Une garde rapprochée pour le Maréchal
 
                Traditionnellement, la protection du chef de l’État en France est assurée par la gendarmerie. Dans la capitale, ce rôle revient à la garde républicaine de Paris. Cette dernière ne pouvant pas statutairement quitter sa résidence, la direction de la gendarmerie décide, en octobre 1940, de constituer un nouveau corps dévoué à cette mission. Une « compagnie de garde personnelle du chef de l’État » est crée le 14 janvier 1941 à Clermont-Ferrand. Le 28 janvier l’unité est prête, comme on peut le lire dans le journal L’Avenir : « Ayant tenue bleu de France, comme les gendarmes, le casque à courte visière comme les troupes de chars d’assaut et des gants à crispins, ces factionnaires ont belle allure ».
                L’arrêté du 19 août 1942 officialise la création de la garde personnelle du chef de l’État. Rattachée administrativement à la 13e légion de gendarmerie départementale de Clermont-Ferrand, cette unité est autonome sur le plan du service et relève du commandant du cabinet militaire du chef de l’État. Le 21 février 1943, la garde personnelle devient une légion.
                Les premiers effectifs s’élèvent à 6 officiers et 170 sous-officiers. Le personnel sélectionné mesure au minimum 1 m 75. En 1942, la compagnie comprend 6 pelotons (5 à pied et 1 motocycliste) et la musique. En juillet 1943, la légion se compose d’un groupe de 3 compagnies, à 3 pelotons chacune, une musique ainsi qu’une batterie-fanfare, soit 15 officiers et 520 gradés et gardes.
 
La vie à Vichy
 
                La garde personnelle est d’abord commandée par le capitaine Delmas, puis le colonel Barré. Elle est répartie sur trois cantonnements : la caserne d’Orvilliers, celle du 11 novembre et le Concours hippique. Sa mission principale est d’assurer la sécurité du chef de l’État aux hôtels du Parc et de Sévigné, hauts lieux du pouvoir à Vichy. Des exercices d’alerte sont régulièrement organisés pour tester le dispositif de sécurité. Le grand salon de l’hôtel du Parc accueille les célébrations officielles telles que la présentation des lettres de créance des ambassadeurs. La garde personnelle, toujours présente, rehausse la cérémonie avec ses uniformes de gala. Les gardes assurent aussi la protection des résidences d’été de Pétain : le château de Charmeil, puis celui de Lonzat.
                 Après la dissolution de l’armée d’armistice, en novembre 1942, la garde est l’unique corps militaire en service à Vichy. Elle participe, seule, aux cérémonies patriotiques avec le drapeau de la gendarmerie départementale dont la garde lui est confiée le 27 août 1942. Le dimanche, la relève de 10 heures attire la foule car le salut aux couleurs s’effectue en présence du maréchal.
Si la proximité du maréchal entretient l’illusion d’un pouvoir souverain, l’arrivée des Allemands en novembre 1942 rappelle à tous les réalités de l’Occupation. En mai 1943, la mise en résidence surveillée de Pétain, pendant 30 jours, au château de Voisin, près de Paris, témoigne de l’omnipotence de l’occupant.
 
La Libération
 
                  En juin 1944, le débarquement de Normandie apporte l’espoir de la Libération. À Vichy, Pétain refuse de rejoindre les Alliés. Parmi ses gardes, certains ont déjà choisi la voie de la Résistance et payé cet engagement de leur vie. C’est le cas du lieutenant Frumin et du capitaine Delmas. Appréhendés, ils ne survivent pas à la déportation. Le chef d’escadron Hurtrel et le lieutenant Bertrand, arrêtés par la Gestapo et internés à Clermont-Ferrand, ne doivent leur salut qu’au départ précipité des Allemands de la ville le 20 août 1944.
                 Dans la semaine du 20 août, une grande effervescence règne à Vichy. Des rumeurs d’enlèvement du maréchal par les Allemands circulent. Barricadés à l’hôtel du Parc, les gardes s’apprêtent à défendre le chef de l’État. Celui-ci, voulant éviter toute effusion de sang, donne l’ordre à ses hommes de ne pas faire usage de leurs armes. C’est donc le cœur serré qu’ils assistent à l’intrusion des Allemands. Seuls des bris de glace et des portes fracturées témoignent d’une résistance symbolique.
                 Le départ du maréchal provoque une certaine confusion à Vichy. Alors que les FFI brûlent d’investir la ville, la proximité des Allemands laisse planer une sourde menace. Au sein de la garde, le colonel Barré souhaite constituer un corps franc de trois compagnies agissant seul contre l’occupant. Mais, dans la nuit du 23 au 24 août, à l’exception d’un peloton restant garder l’hôtel du parc, la totalité du personnel de la garde rejoint le maquis sans ordres du colonel Barré.
                Le 25 août l’adjudant-chef Lordereau, les gendarmes Dourneaud, Arnauné, Schmeltz et un sous-officier aviateur, le sergent Cazenaves, tombent dans une embuscade allemande. Les obsèques qui ont lieu à Vichy le 29 août constituent le dernier rassemblement de la garde personnelle.
                Passés au maquis, les éléments de la garde personnelle progressent jusqu’à Lyon où ils participent aux combats. Durant la campagne de libération, on compte 8 gardes tués et 11 blessés. Le 9 septembre 1944, la garde personnelle est officiellement dissoute.
 
Lieutenant Benoît HABERBUSCH
Département Gendarmerie, Service historique de la Défense.
 
Vidéos : 
 
Relève de la Garde du Maréchal Pétain.
 
Les Audiences du Maréchal