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Les Glières par l'Abbé Truffy |
Extrait des mémoires de l'abbé TRUFFY curé du maquis. (Source : http://histoire-rochoise.over-blog.com/) |
"APPARITION DU GROUPE LAMOUILLE" |
"Dans le courant du mois de novembre apparaissait
au Petit Bornand un Groupe qui allait causer bien des malheurs dans le
pays et qui plus tard serait cause de l'investissement de Glières;
Glières en effet était un terrain de parachutage merveilleux, accepté
par les Alliés, qui devait être défendu à tout prix. C'était aussi
l'endroit choisi pour le regroupement des Maquisards au moment du
débarquement. Il importait donc de ne pas attirer l'attention sur le
pays. C'était pour cela que provisoirement il n'y avait plus de camps au
Petit Bornand. |
Le Groupe Lamouille malheureusement allait par sa turbulence faire
échouer ce plan. |
Marcel Lamouille, natif du Petit Bornand, tenait à Annemasse l'hôtel des
Bains. Arrêté en 1939 et mis dans un camp de concentration par suite des
décrets Daladier sur les Communistes, il réussit à s'évader et fit son
apparition au Petit Bornand dans le courant de 1942, pour commencer à
faire parler de lui au début de novembre. |
Après avoir recruté une troupe hétéroclite, composée de deux Russes et
de quelques indigènes, Lamouille s'équipa facilement en armes, sur
l'ordre de ses chefs, a-t-il dit, en se faisant remettre les dépôts
d'armes de l'A.S. grâce à quelques transfuges qui passèrent, c'est le
cas de le dire, avec armes et bagages de son côté. Il traitait les Groupes d'A.S. d'attentistes et avait paraît-il reçu l'ordre de ses chefs, de créer de l'agitation dans le pays et d'attaquer les boches en toute occasion. |
Aussitôt la danse commence... Faut-il rappeler
l'arrestation du Fruitier de Saxiat pour l'empêcher d'aller chercher le
lait à Beffay... Le pillage de magasins dont le butin est entreposé au
Petit-Bornand et dans lequel on découvre des caisses de
layettes et de biberons... L'arrestation, un mercredi de décembre, des
contrôleurs du Ravitaillement Briffod et Burtin qui, venant
réquisitionner du bétail, se voient dépouillés de leur argent et de leur
voiture... L'arrestation de la camionnette de ramassage du reblochon
dont les caisses furent vendues un dimanche après midi... L'enlèvement,
à l'usine Électrique du Borne d'une dizaine de fûts d'huile de deux cent
litres... La prise de la camionnette de Gaston Thabuis... L'interdiction
aux Fruitières de livrer le beurre et le fromage au Ravitaillement... |
Le 23 décembre au soir le groupe se rend à Puze
chez Marius Caullireau dont le fils Esther faisait partie de la
Trentaine de l'A.S. Pour avoir son argent on martyrise le fils et on
brûle les pieds du père... Et on repart avec un
important butin. A plusieurs reprises, on essaye de désarmer les membres
de l'A.S... Les gens terrifiés nous appellent à l'aide et nous sommes
obligés d'installer un système d'alerte pour porter secours à ceux qui
seraient attaqués. |
À la Messe de Minuit, je déclare aux gens qu'ils ne doivent pas céder
devant les menaces et qu'ils doivent continuer à faire leur devoir en
ravitaillant les villes." |
Devant cette agitation il faut prendre une décision pour empêcher
l'action du Groupe Lamouille de nuire à la fois aux braves gens et à la
résistance……." |
Il faut bien dire qu'entre L'abbé Truffy, homme d'église partisan de
l'AS et Lamouille ,FTP communiste notoire anti-clérical, l'entente était
loin d'être cordiale. |
Sur le conseil de l'abbé Truffy le maire de la commune, nommé par Vichy,
François Merlin prévient la Milice basée à Annecy, des agissements de
Lamouille et demande son arrestation, en fournissant un itinéraire
détaillé pour se rendre à son chalet situé au hameau des "Cerets" sur la
rive gauche du Borne ,de l'autre côté du pont des Lignières. |
Les miliciens montent une expédition pour son arrestation mais font
"choux blanc",à leur arrivée "l'oiseau s'est envolé" ayant probablement
eu vent de cette expédition et s'était probablement réfugié au
chalet du "Plan", planque ignorée jusqu'à l'exécution des "canadiennes". |
Lamouille se rend après chez Merlin et lui profère des menaces, sans
suite immédiate. |
L'abbé Truffy raconte la tragique anecdote
suivante :
"un jeune homme inconnu se présente un dimanche chez moi pour se faire
soigner s'étant blessé avec une hache en coupant du bois. Le dispensaire
étant fermé je le soigne moi-même en lui demandant de revenir dans trois
jours pour renouveler son pansement. A son départ je le piste et je le
vois regagner le chalet de Lamouille. |
Il ne revint pas. |
Un jeune qui se trouvait chez Lamouille m'apprit son sort le mercredi
suivant : Vous savez Monsieur le Curé, celui qui est venu vous voir
dimanche pour se faire panser la main. Lorsqu'il est rentré au camp,
Lamouille lui a demandé d'où il venait. Il a répondu qu'il était venu se
confesser vers vous . Alors Lamouille l'a fait sortir et il l'a
descendu…." |
L'abbé se demande alors si cet individu n'était pas venu avec une
mission bien précise (celle de le descendre) et qu'étant revenu sans
l'avoir accompli il avait pour cela été éliminé. |
L'abbé Truffy conclut ainsi : |
"Il est donc prouvé que si le groupe Lamouille n'avait pas existé, et
n'avait surtout pas attiré l'attention sur la région, Glières n'aurait
pas été découvert ce jour-là et les événements en auraient pu être
changés. L'agitation inconsciente fait parfois porter de lourdes
responsabilités" |
Epilogue: L'abbé Truffy a été arrêté par la
gestapo le 30 mars 1944 et déporté à Dachau.
A son retour, à la libération, il demanda à Lamouille pourquoi il avait
fait fusiller les "Canadiennes" et celui-ci lui aurait répondu :"Que
voulez-vous que j'en fasse, ils devenaient encombrants c'était la
meilleure solution."
François Merlin ,le maire, est lâchement assassiné à son domicile par un
commando. S'agissait t-il d'une vengeance personnel du FTP Lamouille , on le suppose mais l'affaire n'a jamais été élucidé. A petit-Bornand c'était l'omerta et personne n'osait parler!" |
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