A l'occasion des élections Législatives, déplacement de la 3ème brigade à Saint-Pierre le 1er juin 1951.

 

Compte-rendu du Brigadier Marius BAUX commandant la 3ème brigade :

Effectifs  :10 (Bg BAUX-Chauffeur et 8 Gardiens)

Départ    : 5hoo - Arrivée à 11h15.

                   Moyen    : GMC N° 32 F 974.

 

Présentation à Monsieur le Commissaire DEPECHY. Aucun immeuble n'est prévu, le détachement est logé à la salle des fêtes, face aux bassins du port, dans des conditions difficiles : courants d'air permanents, aucune installation d'eau à proximité, aucun W.C. Au niveau de la Gendarmerie, pas de solution possible. La veille le Lieutenant VALLON avait répondu, qu'actuellement  il avait 16 ménages de gendarmes et qu'il ne pouvait pas loger 10 C.R.S. célibataires avec les dites familles.

Après maints appels entre Messieurs DEPECHY et COUTANT, Directeur Départemental à Saint-Denis, une solution est enfin trouvée, notre brigade aménagerait le dimanche 3 au matin dans l'immeuble de Mademoiselle Lydia HOAREAU. Il se compose de 6 pièces, d'une fontaine à un robinet et d'un W.C. dans la cour voisine.

Il est impossible d'obtenir satisfaction en ce qui concerne le branchement électrique et téléphonique. Heureusement les lampes à pétrole amenées de Saint-Denis permirent certaines veillées. Prêt de 2 tables et 6 chaises par la Mairie. Le GMC est garé la journée, devant l'immeuble, la nuit il est conduit dans la cour du Commissariat.

La subsistance étant assurée par une gargote du voisinage. C'est donc dans les conditions particulièrement précaires que doit s'organiser le service. Les élections mettent en présence les deux partis forts du moment, à savoir : le Parti Communiste et le Rassemblement Pour le Peuple Français auxquels se mêle le Député sortant BABET (UDSR), aucun n'hésitant à utiliser la violence pour s'imposer. A l'époque les campagnes électorales pouvaient s'assimiler à des combats de coqs : c'est celui qui 'bat' (abat) l'autre à terre qui a gagné. Tous les ténors viennent s'affronter : R. VERGES, LEPERVANCHE, PIOT pour le PC ; V. CLEMENT, VAUTHIER pour le RPF ; BABET pour l'UDSR.

Il convient donc d'imposer notre présence sur la voie publique et lors des réunions avant que la situation ne dégénère.

Le service va donc s'articuler autour de fréquentes patrouilles sur les itinéraires et horaires variables, et des points fixes aux abords des lieux de réunion, notamment à la tombée de la nuit, moment propice pour les affrontements. Malgré la faiblesse de l'effectif, les patrouilles seront de trois fonctionnaires et l'ensemble du personnel maintenu en alerte permanente.

Parfois, et c'est plutôt cocasse, il faut prêter main forte à la Gendarmerie. C'est le cas notamment le 5 Juin, où sur Dodge et sous commandement d'un officier de cette arme, le Lieutenant VALLON, le brigadier BAUX et 4 gardiens vont mettre de l'ordre à l'Entre-Deux où le Maire voulait interdire toute réunion sur sa commune, et le lendemain par des patrouilles communes entre Saint-Pierre et Saint-Louis, au cours desquelles une rue barrée a dû être dégagée et un bureau de vote évacué. Au retour, l'auto-chenillette et notre GMC tombent en panne : fuite d'essence pour l'un, carburateur encrassé pour l'autre. Ce qui montre bien la précarité du matériel mis à la disposition des deux unités sur lesquelles repose l'ordre public...

Toutefois de nombreuses patrouilles sur Dodge de la Gendarmerie continueront d'être effectuées, souvent loin de notre base.

Le 15 Juin, arrivée d'un renfort de dix C.R.S en prévision du scrutin deux jours plus tard. La case de Mademoiselle HOREAU Lydie peut désormais afficher ‘Complet’.

Le 17 Juin, jour du scrutin, c'est toujours de concert avec la Gendarmerie que les différents services sont assurés sur l'ensemble de la circonscription législative. Certains se trouveront dispersés jusqu'à Saint-Joseph  et Saint-Philippe.

En définitive, les dispositions prises devaient être judicieuses car aucun incident majeur n'a marqué cette période électorale et dès le lendemain tout l'effectif a rejoint la résidence. Ceux, arrivés le 15, empruntant l'autorail, qui supplante depuis quelques temps le train à vapeur, le Renault qui les avait amenés ayant immédiatement regagné Saint-Denis.