Article paru dans le journal "Paris Soir" du 30 décembre 1941 (Gallica) |
".....Derrière ce portail à l'abri de ces murs blanchis à la chaux, s'élabore l'une des plus belles réalisations de la France nouvelle, la réforme complète de l'esprit policier et la création des nouveaux cadres, de ses chefs de demain, les commissaires de police. |
Dés l'entrée, un vaste parc de cinq hectares aux pelouses vertes et aux rentiers bien tracés, avec au centre un grand bâtiment à l'allure sévère, aux lignes régulières. |
C'est en effet dans cet ancien couvent d'Ursulines que le contre-amiral Ven a installé l'école nationale de police, dont il est le directeur. |
Au moment où j'arrive dans le hall précédé par un policier des groupes mobiles, un clairon sonne la soupe. |
Bruits de clous, galopades, glissades et voici la foule des élèves qui dévalent comme des collégiens vers le réfectoire |
C'est déjà le nouvel esprit ; ils sont impeccablement sanglés dans leur uniforme, la nouvelle tenue des commissaires de police, uniforme noir à boutons argentés portant la francisque sortant d'un faisceau de licteur, aux épaules les parements de feuilles d'acanthe..Quand ils sortiront, ils ajouteront un insigne supplémentaire suivant leur classe. |
Le contre amiral Ven qui préside aux destinées de cette école m'en a lui-même fait les honneurs. C'est un homme au visage énergique et bon, droit derrière son bureau, - comme je l'imagine sur la passerelle de son bâtiment. Tout dans l'école rappelle le marin. Les couloirs sont frais, coquets, accueillants, les salles sont vastes et claires, ses élèves sont élégants, le visage ouvert, les yeux francs, comme ceux qu'il formait quand il dirigeait l'école navale. |
Le ministre de l'Intérieur conçut en mars dernier le projet de cette école qui sera pour la police nationale le premier pas vers un esprit nouveau, La loi du 23 avril confirma cette décision : |
Il est constitué une école nationale de police destinée à former les cadres de la police française, en donnant à ceux-ci la culture générale et la formation professionnelle indispensables à l'exercice de leurs fonctions. Cette école prend rang parmi les grandes écoles nationales. » |
Le contre amiral Ven, qui en a été nommé directeur, arrivait seul à. Lyon le 2 juin, chargé de tout organiser, ignorant même en quel endroit il installerait l'école. Le 11 août, l'école nationale de police ouvrait ses portes et recevait les 60 élèves de la première session. |
D'ici quelques jours sortiront 60 nouveaux commissaires de police imprégnés d'une technique et d'un esprit nouveaux, cet esprit vraiment révolution nationale qui permet aux élites de constituer les cadres de la France de demain. |
Le 18 décembre, devant M. Pucheu, ministre de l'Intérieur, venu spécialement à Saint-Cyr au Mont-d'Or, les élèves prêtaient le serment de fidélité au chef de l'Etat. |
Alignés en un garde-à-vous impeccable, ils entendirent le contre amiral Ven lire la formule traditionnelle : Je jure fidélité à la personne du chef de l'Etat, promettant de lui obéir en tout ce qu'il commandera pour le bien du service et dans l'intérêt de la patrie. Je m'engage à exercer mes fonctions selon les lois de l'honneur et de la probité. |
La main droite levée, les futurs commissaires répondirent d'une voix
bien timbrée : Je le jure. |
Pendant une heure, M. Pucheu visita ensuite l'école, les vastes salles spacieuses d'étude, le laboratoire ou le professeur Locard et son fils initient leurs futurs collègues aux mystères passionnants de la police technique, les salles d'escrime, de lutte, de gymnastique. |
Le régime des élèves, sans être militaire, est cependant • très sévère. |
L'internat est obligatoire (même pour ceux qui, mariés, ne bénéficient que d'un jour de congé par semaine). |
Le contre amiral Ven qui a la charge de cette grande œuvre, tout pénétré de sa mission, a l'orgueil de sa réussite. |
Les élèves doivent avoir l'orgueil de leur profession. Elle le mérite et
bientôt les Français auront pour eux la considération qui leur est due.
Rapidement, la police prendra dans la nation la place qu'elle doit
occuper et constituera l'une des colonnes solides sur lesquelles se
reconstruit actuellement l'Etat français. De cette école sortira une
science policière de la même façon que la science des armes a été peu à
peu élaborée dans les écoles militaires." |
RUDY CANTEL |